Marcelle Alix Marcelle Alix
Projects

Sequence I II

Laura Lamiel

22.05.2014 - 19.07.2014, vernissage 22.05.2014


 


[En français plus bas]
Each text we are writing is an occasion to share the irreducible singularity of an artistic work. We choose to position ourselves towards this work, not as mere observers, but rather as subjects committed to absorb it, in a process that cannot be exterior to it. Each production is alive and our commitment is an ever-renewed attempt to render the continuum of a singular exchange, far from the cannons of art criticism, which aims less at following the artists’ ability to reinvent themselves, than at imposing a fixed and arbitrary interpretation. The artwork is a multi-dimensional space where varied motifs from uncertain origins blend and confront themselves. If art is the possibility for an encounter, we experiment it from the inside, as a means to live better within the social order and, above all, as a promise for freedom, mobility, unpredictability, vitality and authenticity.


 


Some works produce the most precise and most open "portraits" or "self-portraits". Laura Lamiel’s practice includes multiple voices. Through their mobility, they constantly adjust to a diversity of objectives and questions: how do we express what we are seeing or guessing to ourselves? How do we address the others so that they share the difficulty to show, but also the difficulty to see? How do we liberate ourselves from simplistic antagonisms? How can a work include a programme of resistance to a power that wants us amnesic, by intensifying the constitution of our memory through objects and images? Can a simple worker's glove become the snapshot of a revolution in progress?

The freedom that Laura Lamiel has been displaying since the 80’s keeps surprising those who know this nonconformist and perceptive spirit. Her practice has blossomed in the silence and asceticism of colour of her studio: a place for meditation, transfers and projections in which the artist progresses without any masks or tricks, far from the stratagems which have made art criticism a power. The Subject is always fragmented--she says again--as she recently staged, with great subtlety at the art center of Noisy-le-Sec, a set of propositions that put the finger on the crucial issue of the social self, as opposed to the possibilities that we fail to explore. Several “cells” were dedicated to a skilful chasse-croisé of alterities which implied the spectator’s active participation--the only person in charge of (mentally) activating those arrangements of familiar objects, as so many indications of an almost-genealogical transmission.

Whether it be by facing the work like we would look at a painting or by inhabiting it through modes of circulation that recall an architectural construction--as much as an organic one--the installation imagined by the artist is a place that can be travelled and commits one's being and thoughts at once. For this project, Laura Lamiel wished to hold onto the real and make sure the work exhibited in the gallery space would become a place in itself, its own space. The work is endowed with a dynamic image of itself and an awareness of the movement which originated it. The wooden floor and the objects that it shelters are like a prototype of the collective soul, the core that can be used to re-produce everything. Everything must be repeated, once the cycle of possible combinations has been completed. The space becomes the object of an experiment, of a psychical event that helps the visitor understand the worldly incompletion of a work that always strives to be reborn and to start over. The incomplete nature of Laura Lamiel’s work is the result of a strained negotiation of combinations that keep appearing and disappearing in the studio, before being replayed in a precise context that the artist observes like a director, looking for light and shadows and for imperceptible cuts.
Most of the time, the artist refuses a classical narration, leaving speechless images and objects softly fold away. She offers a world that looks like an island on which we can wander freely, in search of the experience and the humanity that is within ourselves.

CB


 


Laura Lamiel lives in Paris. Her works were recently shown at Kunstverein Langenhagen, Germany (cur. Ursula Schöndeling), at La Galerie-art center, Noisy-le-Sec, France (cur. Emilie Renard), at Musée d’Art Moderne de Saint-Etienne, France (cur. Anne Tronche, at the occasion of the AICA award), at Silberkuppe, Berlin, Germany and at MAC/VAL, Vitry sur Seine, France (cur. Frank Lamy). Laura Lamiel is also represented by Silberkuppe in Berlin.
Marcelle Alix will present her work, together with that of Charlotte Moth's, at LISTE Basel (June 17-22).


 


Special thanks: Chloé Dugit-Gros, Robin Margerin, Camila Renz, Aurélie Godard.


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Chaque texte que nous écrivons est l'occasion de partager l’irréductible singularité d'un travail artistique, vis-à-vis duquel nous nous plaçons moins comme observatrices que comme sujets engagés dans un processus d'absorption ne permettant pas d'être extérieur à l’œuvre. Chaque production est vivante et notre engagement est une tentative sans cesse renouvelée de restituer le continuum d'un échange original, sans se conformer aux canons d'une discipline telle que la critique d'art, souvent moins occupée à suivre la capacité de l’artiste à se réinventer, qu’à imposer l’arbitraire fixité de l'interprétation. L'œuvre est un espace à dimensions multiples où se confondent et s'opposent des motifs variés dont les origines sont incertaines. Si l'art est une possibilité de rencontre, nous l'expérimentons de l'intérieur, comme un moyen de mieux vivre l’ordre social et surtout comme une promesse de liberté synonyme de mobilité, d'imprévu, de vitalité et d'authenticité.


Certaines œuvres dressent à la fois les plus précis et les plus ouverts des "portraits" ou "autoportraits". Chez Laura Lamiel, cela se traduit par une multiplicité de voix. Leur mobilité les ajuste constamment à une diversité d'objectifs et de questions: comment se dire à soi même ce que l'on voit ou devine? Comment s'adresser à l'autre pour qu'il partage cette difficulté qu'il y a de montrer, mais aussi de voir? Comment se libérer des antagonismes trop simples? Comment inclure son travail dans un programme de résistance au pouvoir qui nous veut amnésiques, en intensifiant par les objets et par les images la constitution de notre mémoire? Un simple gant de travailleur peut-il devenir l'instantané d'une révolution en cours?

La liberté dont a fait preuve Laura Lamiel, depuis les années 1980 jusqu'à aujourd'hui, ne cesse d'étonner ceux qui auront su remarquer cet esprit anticonformiste et perspicace. Sa pratique s'est épanouie dans le silence et l'ascèse de couleur de son atelier, lieu de méditation, de transferts et de projections dans lequel l'artiste avance sans masque ni artifices, éloignée des ruses et des tactiques qui ont fait de la critique un pouvoir. Le sujet est toujours fragmenté nous redit-elle et c'est avec une grande finesse qu'elle a récemment mis en scène, au centre d'art de Noisy-Le-Sec, un ensemble de propositions qui mettait le doigt sur la question cruciale du Moi social, opposé à toutes les potentialités que nous n'exploitons pas. Plusieurs "cellules" étaient dédiées à un savant chassé-croisé d'altérités qui impliquait une participation active du spectateur, seul responsable de l'activation (mentale) de tous ces arrangements d'objets familiers, comme autant d'indices d'une transmission quasi-généalogique.

Que ce soit en faisant face à l'œuvre comme on regarderait un tableau, ou en l'habitant par des modes de circulation qui impliquent une construction architecturale, tout autant qu'une construction organique, l'installation imaginée par l'artiste se parcourt et engage l'être et la pensée tout entiers. Pour ce projet, Laura Lamiel souhaitait se raccrocher au réel et faire en sorte que l'œuvre exposée dans l'espace de la galerie devienne en elle-même un lieu, son propre lieu. L'œuvre est dotée d'une image dynamique d'elle-même et d'une conscience du mouvement qui l’a produite. Ce sol en bois et tous les objets qu'il abrite sont comme un prototype de l'âme collective, le noyau qui doit servir à tout re-produire. Tout doit se répéter, une fois achevé le cycle des combinaisons possibles. Le lieu devient l'objet d'une expérience, d'un événement psychique par lequel le visiteur peut appréhender l'inachèvement temporel d'un travail qui toujours veut renaître et recommencer. L'inachèvement dans l'œuvre de Laura Lamiel est le résultat d'une négociation tendue à partir des combinaisons qui surgissent et s'anéantissent au sein de l'atelier, avant d'être rejouées dans un contexte précis que l'artiste regarde comme le ferait un metteur en scène, toujours en quête de lumière et d'ombres, de cuts imperceptibles.
Il s'agit le plus souvent de refuser une narration classique, laissant les images silencieuses et les objets se replier doucement. C'est un monde que propose l'artiste, ressemblant fort à une île sur laquelle nous pouvons marcher librement à la recherche de l'expérience et de l'humain qui est en nous.

CB


Laura Lamiel vit à Paris. Ses oeuvres ont été montrées récemment au Kunstverein Langenhagen, Allemagne (cur. Ursula Schöndeling), au centre d'art La Galerie, Noisy-le-Sec (cur. Emilie Renard), au Musée d’Art Moderne de Saint-Etienne (cur. Anne Tronche, dans le cadre du prix AICA), à la galerie Silberkuppe, Berlin et au MAC/VAL, Vitry sur Seine (cur. Frank Lamy). Laura Lamiel est aussi représentée par la galerie Silberkuppe à Berlin.
Marcelle Alix présentera son travail, ainsi que celui de Charlotte Moth, à LISTE Basel (17-22 juin).


Remerciements: Chloé Dugit-Gros, Robin Margerin, Camila Renz, Aurélie Godard.