Effigies
Marie Voignier
26.05.2010 - 31.07.2010, vernissage 26.05.2010
En français plus bas
Film screenings
Tuesday 6 July, 7:30 pm
Screening of short films by Marie Voignier, with the artist present
Tuesday 13 July, 7:30pm
Screening of Hinterland, with the artist and Dork Zabunyan (Associate Professor in Cinema Studies at Lille University) present
The Effigies exhibition is an opportunity to present practically all Marie Voignier's films, with the aim to reveal her work in its entirety. Installations and evening screenings will enable the discovery of a particular trajectory, echoing contemporary theory, in which the image is restored as a tool for the production of knowledge.
What could be the common denominator between a recreation park installed in an old zeppelin warehouse, a training centre that places its trainees in a chain of fictitious companies, the press coverage of the Austrian criminal Fritzl's lawsuit and the career path of a voice-off actress? These subjects have all been covered by Marie Voignier in various video works completed between 2004 and 2010 (Hinterland, 2009, Les fantômes, 2004, Hearing the Shape of a Drum, 2010, Going for a Walk, 2007) in which she tackles the construction of reality in film. In each instance, it is the indeterminate gap between reality and fiction which seems to be the object of her study.
For the installation Going for a Walk, Marie Voignier conducted an interview of a voice-off actress who is also a TV presenter during which she narrates different episodes of her professional life. The interview was transcribed and the actress was asked to "replay" the text on several occasions during the course of a year. Transformed into a script, her life became unbearable and the actress terminated the recording prematurely.
In Hearing the shape of a drum, Marie Voignier turns her attention to a current affair that leads to a lawsuit behind closed doors in order to reveal the mise en scène that occurs around news items during "on-the-spot" TV reporting. She mixes in with the crowd of journalists, mimicking them as they compensate for the lack of images of the courtroom or crimes, and take the media dance as the subject of their reports. What initially appears like the deconstruction of TV images, showing what goes on "behind the scenes", then takes on a more ambiguous dimension. By a careful choice of shots and a precise construction during the montage, the artist in fact reinstates the image that has been questioned by postmodernist critique (in the wake of Debord or Baudrillard, the image was vilified for a while as an instrument of manipulation and lies). While one image alone can't tell "the whole truth" since it is just a fragment, a partial object, a montage of several images "intensifies the image and gives the visual experience a power that our visible certainties or habits have the effect of pacifying or veiling." With discreet attempts throughout her filmography, Voignier proceeds to redeem the image as a tool for the production of knowledge.
In Des trous pour les yeux (Holes for the Eyes, 2009), the film she made in collaboration with Vassilis Salpistis, an anthropologist at the Museum of Thessalonica puts on a traditional Greek costume which belongs to the museum collection and launches into a ritual dance. Against all expectations, through the montage, the ethnologist's discourse then bears witness to his own working conditions. The artist creates new links between the museum object and the discourse attached to it. As in Hinterland or Les fantômes, the "official" discourse is contradicted by facts and takes the form of a mascarade.
Marie Voignier does not posit herself as a preacher: she ceaselessly questions aspects of reality in her work in order to bring it back to the fore later on. She seems to exercise a "right to withdraw" that gives more strength to her intention (never imposed by any discourse but carefully suggested through the construction of an image). By fabricating dissensus, " different communities of words and things, forms and meanings", she inverts the logic of those who denigrate the image. She turns upside down the customary opposition between language (the privilege of an intellectual elite, linked to the father figure) and images (tools to manipulate the TV-stricken masses). Her fictions can be considered as tools to be used by the intelligent/ emancipated spectator to better understand reality.
IA
Georges Didi-Huberman, Images in Spite of All, 2008: University of Chicago press, p.136
Jacques Rancière, The Emancipated Spectator, 2009: Verso, p.102
Born in 1974, Marie Voignier lives in Paris. The CAC Brétigny (France) co-produced and exhibited her film Hinterland in 2009. She received the Prix des médiathèques at the Festival International du Documentaire (FID, Marseilles) in 2009 and the prize for short films at the festival Cinéma du Réel at the Centre Pompidou in 2007. Hearing the Shape of a Drum will be shown at the Berlin Biennial from 11 June to 8 August 2010. Voignier will have a solo show at the Espace Croisé in Roubaix (France) in 2011.
Soirées de projection
Mardi 6 juillet, 19h30
projection de courts-métrages de Marie Voignier, en présence de l'artiste
Mardi 13 juillet, 19h30
projection de Hinterland, en présence de l'artiste et de Dork Zabunyan, maître de conférence en études cinématographiques à l'Université de Lille 3
L'exposition Effigies est l'occasion de présenter de façon quasi-exhaustive les films de Marie Voignier, avec la volonté de donner à voir l'ensemble de son travail. Installations et soirées de projection permettront de découvrir une trajectoire précise qui s'inscrit dans un paysage théorique contemporain, où l'image est réhabilitée comme outil de connaissance.
Que peuvent avoir en commun un parc de loisirs installé dans une ancienne halle à zeppelins, une boîte de formation qui intègre ses stagiaires à une chaîne d'entreprises fictives, la couverture médiatique du procès du criminel autrichien Fritzl et le récit du parcours professionnel d'une actrice de voix-off ? A travers ces sujets, tous traités par Marie Voignier, dans divers travaux vidéos réalisés entre 2004 et 2010 (Hinterland, 2009, Les fantômes, 2004, Hearing the Shape of a Drum, 2010, Going for a Walk, 2007), l'artiste aborde la construction du réel par le film. C'est à chaque fois l'interstice d'indétermination entre réel et fiction qui semble être l'objet de son étude.
Pour réaliser l'installation Going for a Walk, Marie Voignier a mené l'interview d'une actrice de voix-off et présentatrice télé, au cours de laquelle cette dernière narre différents épisodes de sa vie professionnelle. L'interview retranscrite, il lui est demandé de « rejouer » le texte à plusieurs reprises, sur une période d'un an. La vie transformée en script lui apparaît insupportable, obligeant l'actrice à mettre prématurément fin au processus d'enregistrement.
Dans Hearing the shape of a drum, Marie Voignier s'empare d'un fait divers qui donne lieu à un procès à huis-clos pour dévoiler la mise en scène de l'actualité par le reportage télé « à chaud ». Elle se mêle à la foule des journalistes, et, tout comme eux, pour combler le manque d'images du procès et des crimes, prend le ballet médiatique comme sujet de reportage.
Ce qui peut d'abord apparaître comme une déconstruction de l'image télévisuelle montrant « l'envers du décor », prend ensuite une dimension plus ambigüe. Par un choix de plans attentif, une construction précise du montage, l'artiste réhabilite en fait l'image mise en doute par la critique post-moderniste (dans le sillage de Debord ou de Baudrillard, l'image a été un temps diabolisée, devenant instrument de manipulation et de mensonge). Si on ne peut demander à une seule image de dire « toute la vérité » car elle n'est qu'un lambeau, qu'un objet partiel, le montage de plusieurs images « intensifie l'image et rend à l'expérience visuelle une puissance que nos certitudes ou habitudes visibles ont pour effet de pacifier, de voiler. » C'est à une rédemption de l'image comme outil de connaissance que Marie Voignier procède, par petites touches, à travers l'ensemble de sa filmographie.
Pour le film Des trous pour les yeux (2009), co-réalisé avec Vassilis Salpistis, un anthropologue du Musée de Thessalonique s'accoutre d'un costume traditionnel grec appartenant aux collections du musée et se livre à une danse rituelle. Par effet de montage, vient alors le discours de l'ethnologue qui, contre toute attente, témoigne de ses propres conditions de travail. L'artiste crée ainsi de nouveaux rapports entre l'objet de musée et le discours qui lui est lié. Comme dans Hinterland ou Les fantômes, la parole « officielle » est contredite par les faits, et prend les traits d'une mascarade.
Marie Voignier ne se pose pas en donneuse de leçon : elle met sans cesse en doute la part du réel dans son travail pour mieux la réhabiliter par la suite. Elle semble exercer un « droit de retrait » qui donne plus de force à son propos, jamais imposé par le discours, toujours suggéré par une image soigneusement construite. En fabriquant du dissensus, « d'autres communautés des mots et des choses, des formes et des significations », elle inverse la logique qui anime les détracteurs de l'image. Elle procède au renversement de l'opposition coutumière entre langage, apanage de l'élite intellectuelle, de l'ordre du père, et images, instruments de manipulation des masses abruties par la télévision. Les fictions ainsi réalisées sont un outil de compréhension du réel au service de l'intelligence du spectateur.
IA
Georges Didi-Huberman, Images malgré tout, Les Editions de Minuit, 2005, p.170
Jacques Rancière, Le spectateur émancipé, La Fabrique éditions, 2009, p.112
Née en 1974, Marie Voignier vit à Paris. Le CAC Brétigny a co-produit et exposé son film Hinterland en 2009. Elle a reçu le Prix des médiathèques au Festival International du Documentaire (FID) en 2009 et le Prix du court-métrage au festival Cinéma du Réel au Centre Pompidou en 2007. Hearing the Shape of a Drum sera présenté à la Biennale de Berlin du 11 juin au 8 août 2010. L'Espace Croisé à Roubaix consacrera une exposition personnelle à l'artiste en 2011.